Lois, plans, coups de chaud et gels de rentrée
La démission de Nicolas Hulot le 28 août laisse nombre de dossiers entre deux eaux. Biodiversité, mobilités, feuille de route énergétique… François de Rugy, nommé ministre de la transition écologique et solidaire le 4 septembre, est attendu. Le nouveau patron de l’Hôtel de Roquelaure « rencontrera tout le monde ». Dans un communiqué la fédération nationale des chasseurs salue « la nomination d’un pragmatique ». Autres sujets chauds de la rentrée : les loi Élan et Essoc, France territoires et des circulaires de l’été.
Le Plan de sauvegarde de la biodiversité (90 actions), présenté le 4 juillet dernier, fera-t-il les frais du départ du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire ? Plusieurs associations, acteurs de l’environnement et membres du CNB (comité national de la biodiversité), auquel participe la FNCAUE, avaient salué ce plan, tout en s’alarmant du manque de moyens financiers alloués. Le gouvernement a annoncé 600 millions d’euros « supplémentaires » sur 4 ans. Une partie des crédits proviendra en réalité des budgets des agences de l’eau ; une autre avait déjà fait l’objet d’annonces.
Nombre d’actions concernent directement le cœur de métier du réseau des CAUE : la lutte contre l’artificialisation des sols, la nature en ville, l’initiative TEN (Territoires engagés pour la biodiversité)…
Qu’en est-il du projet de loi d’organisation des mobilités (Lom) ? L’ex-numéro 3 du gouvernement en avait donné quelques grandes lignes le 20 juillet avec sa ministre des transports, Élisabeth Borne. Le texte devait être présenté initialement en avril, puis en septembre. Il serait finalement discuté fin 2018, voire début 2019.
Une partie de l’avant-projet de loi a été déposé en août au Conseil d’État. 29 articles sur la réforme de la gouvernance des transports et les compétences des collectivités, les mobilités propres et l’ouverture des données. Il constituerait l’évolution législative la plus significative pour les mobilités depuis la Loti (loi d’orientation des transports intérieurs) de 1982. Il doit également fixer la programmation financière et opérationnelle des projets d’investissements dans les infrastructures de transport pour la période 2018-2037.
Le Plan Vélo, qui prévoit de tripler la part modale du vélo d’ici à 2024 (date des Jeux olympiques), en passant de 3 % à 9 %, serait détaillé en septembre. Bercy freinerait sur les moyens financiers alloués au plan, 200 millions d’euros pour un fond vélo.
Autre sujet chaud : la révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Cette feuille de route du pays en matière d’énergie, pour les périodes 2019-2023 et 2023-2028, soumise il y a quelques semaines à un débat public, est censée être bouclée pour la fin de l’année. Outre la part du nucléaire, le gouvernement devra arbitrer sur la trajectoire de développement des énergies renouvelables et sur les filières et préciser comment il compte atteindre les objectifs fixés par la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015.
L’ex président de l’Assemblée nationale assuré le 5 septembre sur France Inter que la nouvelle PPE serait présentée à « la fin du mois d’octobre ».
Une première mouture de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) serait rendue publique à la rentrée. Ce document fixe des plafonds d’émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser dans les secteurs des transports, du bâtiment, des déchets, de l’agriculture… Les objectifs sont redéfinis tous les cinq ans.
Pour espérer tenir ses engagements, le gouvernement doit notamment doubler la dotation du fonds chaleur de l’Ademe. Une action mainte fois reportée sous le mandat de François Hollande et une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. L’agence a vu ses crédits baisser en 2018. Quid des derniers arbitrages avant le projet de loi de finances 2019 ?
Coupes et mutualisation
Le plan de rénovation énergétique des bâtiments, acté en avril, a lui été présenté par Nicolas Hulot et Jacques Mézard, ministre en charge du logement. Il affiche un objectif de 500 000 rénovations thermiques par an au cours de 5 prochaines années… avec deux fois moins de crédits alloués.
Le projet de loi Elan (évolution du logement, de l’aménagement et du numérique) achève son parcours parlementaire. Le texte a été voté par le Sénat le 25 juillet et la commission mixte paritaire convoquée le lendemain. Elle devrait se réunir le 18 septembre.
Outre la qualité architecturale des logements, sur laquelle la FNCAUE s’est mobilisée au côté du Cnoa, ou la modification de la loi littoral, le texte encadre les outils du plan « action cœur de ville ».
Celui-ci devrait être piloté par la future Agence nationale de cohésion des territoires ; un dossier sensible. Le rapport du préfet Serge Morvan, chargé d’une mission de préfiguration, n’a pas été rendu public lors de sa remise au Premier ministre le 18 juin dernier.
Baptisée « France territoires », elle intégrerait les moyens humains et financiers du CGET, de l’Anru, de l’Anah et de l’Épareca (Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux). Elle serait créée le 1er janvier 2019 et serait « l’interlocutrice unique de tous les préfets et de tous les ministères pour les sujets qui touchent à la cohésion des territoires », précise le commissaire général à l’égalité des territoires.
Le Cerema et l’Ademe seraient liés à France territoires via « une relation ‘client-fournisseur’ afin que cette dernière puisse mobiliser leurs ressources humaines et financières nécessaires à son action ». Aucun mot en revanche sur le type de relation envisagé avec l’AFB.
Le rapport prône « une mutualisation des moyens d’intervention, des outils de prospective et des fonctions support au service d’une ambition commune ».
Confiance
La loi pour un État au service d’une société de confiance (Essoc) est parue au JO du 11 août. Elle ne se résume au « droit à l’erreur » et touche à nombre de domaines d’intervention des collectivités territoriales. Ce texte concerne également le secteur de la construction, dont il souhaite simplifier les normes. Selon le ministère de la cohésion des territoires, il « modernise le rapport entre le public et l’administration par une série de dispositions concrètes s’adressant à tous les usagers – particuliers comme entreprises – dans leurs relations quotidiennes avec les administrations ».
La loi Essoc contient notamment deux projets d’ordonnances (art. 49). La première porte sur le « permis de faire », introduit à titre expérimental par la loi CAP du 7 juillet 2016. Rebaptisé « permis d’expérimenter », il serait élargi à de nouvelles dérogations (matériaux et réemploi, performance énergétique, décence des bâtiments…). Et ce, « sous réserve » que le maître d’ouvrage « apporte la preuve qu’il parvient, par les moyens qu’il entend mettre en œuvre, à des résultats équivalents à ceux découlant de l’application des règles auxquelles il est dérogé et que ces moyens présentent un caractère innovant ».
Cette ordonnance pourrait être soumise à consultation publique dès la rentrée et précédera une autre ordonnance, qui permettrait une réécriture complète des règles de construction. Des objectifs de résultats se substitueraient aux prescriptions de moyens. Selon Jacques Mézard, les travaux préparatoires devraient débuter courant septembre.
Ce texte de loi ouvre également l’accès des données foncières à l’ensemble des acteurs de l’urbanisme, de l’aménagement et de l’immobilier (art. 13 en attente de décret).
D’autres articles à vocation simplificatrice concernent le dialogue environnemental, les énergies renouvelables et les Sraddet.
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Des changements sont également attendus rue de Valois. Début juillet, Emmanuel Macron a chargé Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux, d’une mission sur la réorganisation complète de la direction générale des patrimoines. Le rapport est attendu pour mi-septembre. Qui pour prendre la suite de Vincent Berjot ? La direction est pour l’heure assurée en intérim par Jean-Michel Loyer-Hascoët, chef de service, adjoint au directeur général des patrimoines, chargé du patrimoine.
Reste l’avant-projet de loi de finances 2019. Édouard Philippe a donné le ton le 26 août dans les colonnes du JDD. Les auditions des différents ministres et hauts fonctionnaires débuteront le 3 octobre.
Le budget du ministère de la transition écologique serait maintenu. Celui du logement et de la cohésion des territoires risque de faire les frais des derniers arbitrages.
C.R.
Services déconcentrés de l’État, économies et départements
Le 24 juillet, Édouard Philippe a adressé deux circulaires ; la première aux membres du gouvernement ; la seconde aux préfets. L’objet ? « L’organisation territoriale des services publics » ou comment et où faire des économies. Les administrations déconcentrées seront mises à contribution pour remplir les objectifs du programme « CAP 2022 » (comité « action publique 2022 ») et satisfaire l’objectif de réductions des effectifs des fonctionnaires d’État.
« Un effort de clarification et de simplification des compétences respectives de l’État et des collectivités territoriales doit être entrepris », écrit le Premier ministre.
La présence de l’État sur le terrain « mérite aujourd’hui d’être analysée pour que chaque mission publique soit assurée dans les meilleures conditions et sans redondance inutile et coûteuse ». Le chef du gouvernement estime que certaines missions de l’État dans les territoires « peuvent être allégées », en matière, entre autres, de développement économique, de tourisme, de logement, de soutien à la création et aux industries culturelles.
Pour certaines missions « le rôle de l’État doit être réaffirmé, en renforçant si nécessaire les moyens ». France territoires (cf. ci-contre) « aura besoin de compétences d’ingénierie sur le terrain ». Côté environnement, une mission d’inspection « précisera les modalités d’intervention de l’État » entre les services déconcentrés et les opérateurs dans le domaine de l’eau et de la biodiversité.
Une occasion de souligner que « l’importance du niveau départemental doit être clairement réaffirmée ». Charge aux responsables de budgets opérationnels de programmes (RBOP) de le traduire via « l’affectation de ressources à cet échelon ».
Cette instruction vise également à introduire davantage de « souplesse » et de « modularité » dans l’organisation des services départementaux et prône des fusions ou rapprochements de directions départementales interministérielles, ainsi que des coopérations interdépartementales (exercice de missions entre départements limitrophes, etc.).
Les préfets de région rendront leurs copies seconde quinzaine d’octobre.
L’ESSENTIEL DE L’ACTU
Régulièrement, la FNCAUE vous propose un point d’actualité sur tout ce qui touche à l’architecture, l’urbanisme, l’environnement, les paysages, l’énergie, les territoires…
[publié le 05/09/2018]